Citation de la semaine no 77
4 octobre 2024
Le vent souffle sur l’Atlantique !
Marie-Élisabeth Rocbert de la Morandière, mieux connue sous le nom d’Élisabeth Bégon, est née à Montréal en 1696 et fait partie de l’élite de son époque. Cette épistolière a laissé neuf cahiers composés de lettres adressées pour la plupart à son gendre. Ces lettres témoignent non seulement de la vie familiale d’Élisabeth Bégon, mais aussi de la vie politique et culturelle de l’époque, à quelques années de la fin du Régime français.
La citation que nous tirons aujourd’hui de cette correspondance remonte à l’automne 1749. Élisabeth Bégon décide alors de quitter son pays natal et d’embarquer pour la France, où elle décèdera quelques années plus tard, en 1755. Elle raconte dans plusieurs de ses lettres la traversée – parfois tranquille, parfois houleuse – de l’Atlantique. On ne peut que deviner l’effet que le mauvais temps a pu avoir sur l’équipage et les passagers à bord.
La transcription proposée par France Martineau et Yves Charles Morin respecte la graphie originale. Nous y trouvons donc plusieurs « s longs », une ancienne forme du « s » minuscule (comme dans ſinque pour cinq ; vaiſſaux pour vaisseaux) et d’autres anciennes graphies (comme feste pour fête ou paine pour peine). On notera aussi que la scriptrice écrit jay (en une seule forme) pour j’ai, un phénomène bien attesté dans d’autres documents similaires datant de cette époque. Dans la transcription, la frontière des mots est indiquée par une barre verticale (j|ay).
Réussissez-vous à déchiffrer ce court passage? Voici une transcription adaptée pour vous aider à identifier tous les mots : « Pour le coup, cher fils, j’ai eu peur par le gros vent que nous avons eu depuis cinq jours. Je ne me suis jamais trouvée à pareille fête : le vaisseau, à ce qu’il me semblait, sens dessus dessous. […] Nous avons été quatre jours sans oser sortir du lit. Les officiers les plus fermes avaient peine à se tenir. » Nous reprenons cette transcription moderne à l’édition de Nicole Deschamps (parue aux éditions Boréal).
pour le coup cher fils j|ay eu peure par le gros vand que
nous avons eu depuis ſinque 5 jours. je ne me ſuis
jamais trouveṙ a pareillie feste le vaiſſaux a, ce
qui me ſembles, ſandeſſus deſſous. […]
nous avons été quatre jours ſans oſé
ſortire du lit, les oficiers les plus ferme avet
paine a ce tenir
Source de la citation :
Source : Lettre d'Élisabeth Bégon, 22 octobre 1749, BAnQ Québec, Fonds Famille Bégon (P2,P208). Transcription et établissement du texte par France Martineau et Yves Charles Morin (2009). [Corpus Bégon]